Cette page résume le reportage vidéo et reprend en transcription synthétique les passages essentiels.

Lundi 22 mai 2017, le journal télévisé "19 trente" de la chaîne "la une" de la RTBF a présenté dans la rubrique "le SCAN" un reportage du journaliste Tristan Godaert (T.G.) sur le ghostwriting académique : la rédaction non-autorisée par un professionnel d’un travail de fin d’études (TFE).

Ce reportage montre d’abord l’importance de cette fraude dans les universités belges en interrogeant le ghostwriter Es teban Vas quez (E.V.), qui s’autoproclame comme le meilleur de Belgique. Actuellement, ce ghostwriter s’occupe de dix documents à la fois.

Écrire un TFE est facile pour lui :

E.V. : - Une introduction qui amène trois parties théoriques, puis une introduction méthodologique qui prépare une enquête, puis une analyse pour terminer. Tout le reste est de la mise en boîte.

Selon ce ghostwriter, il rédige des TFEs pour des formations de soins infirmiers, de ressources humaines, de comptabilité, voire pour des certificats de fin d’études secondaires. Pour ces derniers documents, ce sont les parents qui le contactent, alors que pour les autres documents, il traite directement avec l’étudiant.

Le ghostwriter E.V. présente ses deux assistantes malgaches par vidéo conférence. Elles travaillent pour lui à moins d’un euro par heure. Il facture 1’700 euros pour la rédaction d’un mémoire de 80 pages qui, selon lui, répond aux exigences de qualité demandées. Pour E.V., son travail ne sert pas à tricher. Un subside devrait même lui être attribué pour son assistance à l’insertion socio-professionnelle.

Selon Philippe Emplit (P.E.), Vice-Recteur de l’Université Libre de Bruxelles : - Si l’étudiant n’a pas fait le travail, il y a fraude. Les mesures suivantes peuvent être prises : annulation de la note du mémoire, de la session d’examens, voire des sanctions plus importante pour un étudiant récidiviste.

Le journaliste T.G. : - ... Mais les écrivains fantômes sont difficile à détecter ?

C’est l’un des arguments avancés par le ghostwriter E.V. qui prétend avoir rédigé 350 mémoires en écrivant à la manière d’un étudiant qui réécrit une vingtaine de fois la même phrase. Pour ce ghostwriter, cela rend son travail indétectable.

Indétectable ? Pas tant que ça, l’équipe du SCAN a trouvé plus malin. Le journaliste T.G. se rend en Suisse à Lausanne (note du transcripteur: à la HES-SO) pour vérifier si le travail des ghostwriters est indétectable. Il y rencontre Claude-Alain Roten (C.-A.R., note du transcripteur: directeur d’OrphAnalytics) à Lausanne. Son logiciel anti-ghostwriter permet de déterminer si une personne est l’auteur d’un texte, qu’il s’agisse de livres politiques, de romans, de mémoires.

Selon C.-A.R. : - On n’analyse pas l’information, mais la façon dont elle est mise en perspective. Tournure de phrase, style, choix des mots. Dès que l’on s’attaque à la syntaxe, on a l’information la plus personnelle d’un auteur... Une sorte d’empreinte digitale...

T.G. poursuit : - Nous avons défié le logiciel avec cinq mémoires écrits par des étudiants d’universités belges. Trois ont été rédigés par trois étudiants différents (note du transcripteur : un étudiant rédacteur par TFE). Deux autres par le ghostwriter E.V. Résultats : 24 heures plus tard.

Comparaison par statistique multivariée des types de mots les plus fréquents pour enrichir en mots outils, extraits normalisés de 10’000 caractères environ. Ce graphique illustre la variance maximale qui sépare en deux dimensions les fragments de texte symbolisés par des pictogrammes.

Le journaliste T.G. commente le graphique reçu de C.-A.R. d’OrphAnalytics.

T.G. : - Il y a des triangles en haut (note du transcripteur : roses ...), des points (... au milieu : rouges...), des triangles inversés en bas (... orange). Ce sont les trois étudiants ?

C.-A.R. : - Oui.

T.G. : - Et le nuage bleu constitué de deux types de symboles (note du transcripteur : triangles et losanges), c’est le ghostwriter ?

C.-A.R. : - Exactement, c’est le ghostwriter. Il a écrit pour deux étudiants (note du transcripteur : un type de symbole par étudiant) qui vont apparaître dans le même nuage bleu.

Le journaliste T. G. : - Grâce au style d’écriture, le logiciel a pu déterminer qu’une seule personne avait écrit deux mémoires. Comme les 350 autres déjà écrits par E. V. qui ont été validés par les meilleures universités belges. Des tricheurs diplômés pourraient être débusqués par le logiciel anti-fraude. Mais son prix, 30’000 euros (note du transcripteur le prix varie en fonctions des options choisies et du nombre d’étudiants) risquent de dissuader nos universités.

Philippe Emplit, Vice-Recteur de l’Université Libre de Bruxelles : - Je concède que ce soit possible, mais si j’avais des moyens importants à mettre en œuvre, je le consacrerais à la prévention et à l’éducation, plutôt qu’à la détection de la fraude, limitée selon moi.

Le journaliste T.G. : - En Suisse on estime à 10% la part de mémoires frauduleux. Peu de chances que notre pays échappe à cette tendance. Des écoles suisses ont attaqués en justice des sites de ghoswriters. Mais delà à dire que la profession a du soucis à se faire, il y a de la marge.

Un reportage de : T.Godaert, M.Saccomanno, D.Delcour, R.Hoyois, R.Halbardier, F.Andreoletti, V.Somers, J.Lagneaux

Commentaire

Note : la RTBF a demandé aux spécialistes d’OrphAnalytics de mener au mieux les analyses de comparaison de style de textes. Ces derniers ont acceptés dès que la liberté d’experts leur a été accordée, i.e. obtenir et défendre leurs résultats, si nécessaires en désaccord avec ceux attendus par l’équipe de la RTBF. En contrepartie, l’équipe d’OrphAnalytics s’engage a garder confidentiel tout ce qui peut être déduit par l’analyse de ces textes anonymes.

Nous remercions l’équipe de la RTBF menée par le journaliste Tristan Godaert ainsi que le rectorat de la HES-SO (plus de 20’000 étudiants) représenté par le Vice-Recteur Yves Rey, qui nous a accueilli pour ce tournage dans leur école de master de Lausanne. La HES-SO est la première haute école au monde à introduire une stratégie de contrôle de ghostwriting afin de documenter le respect des bonnes pratiques rédactionnelles de leurs étudiants, gage de future intégrité professionnelle.

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